Ça paraît bête à dire, surtout à cette époque de culture hors-sol, sous serre, de variétés améliorées voire carrément modifiées, mais il y a un moment propice à la dégustation de chaque aliment frais, que l'on appelle une saison. A ce moment-là, le fruit, le légume, la viande ou le poisson sont au mieux de leurs qualités gustatives et nutritionnelles. Chaque mois un nouveau légume, une nouvelle viande, et chaque semaine une nouvelle variété laisse sa place à une autre. La nature est généreuse, on compte plus de 200 variétés de riz cultivées à l'heure actuelle sur la planète, des dizaines de variétés de tomates, pommes de terre, agrumes, etc...

Un produit frais de saison, c'est quoi ?

Les produits de saison sont des aliments dont on a respecté le cycle de croissance et de maturation, en s'efforçant d'optimiser la gestion des ressources, terrains et apports . Une saison se déroule en trois temps :

  • primeur ou hâtif, le produit commence à arriver sur les étals ;
  • saturation ou pleine saison, le produit est présent en abondance, le prix baisse ;
  • déclin ou fin de saison, le produit est moins présent, derniers instants de gourmandise avant l'année prochaine.

Le goût du primeur n'est pas toujours pleinement développé mais souvent inversement proportionnel à son prix, aussi vaut-il parfois mieux attendre quelques semaines pour un meilleur rapport qualité/prix, notamment pour certains fruits. A contrario, l'oignon, l'échalote et l'ail sont au mieux de leurs qualités nutritionnelles et digestives, leur consommation pèsera donc moins sur les estomacs sensibles et haleines délicates.

La fin de saison sera l'occasion de bonnes affaires et de promotions (mais attention : le cageot de 5kg de petits pois à moitié prix c'est cool, mais écosser ensuite 5 kg de pois finalement desséchés et/ou squattés par une vie larvaire à un stade avancé, c'est pas cool ! ;) ). A ce moment, certains fruits tels que les pommes, poires, coings, prunes, bananes, (entre autres) offrent des saveurs plus riches, plus profondes et plus subtiles à la fois, permettant confitures, gelées et compotes encore plus savoureuses !

Pourquoi consommer un produit de saison plutôt que les aliments en carton-pâte standardisés proposés par de plus en plus d'entreprises agro-alimentaires ?

  • Prenons l'exemple de la culture et de la vente de fraises fraîches en décembre (approvisionnement hors-saison), elle demande un investissement plus important en matériel et en énergie (serre, chauffage, engrais, pesticides, transport) que la culture classique en champ ; le coût économique et écologique élevés maintiennent une pression forte notamment sur les agriculteurs ;
  • A chaque saison ses besoins, avantages et inconvénients : courges, cucurbitacées et légumes racines réchauffent l'hiver, tandis que fruits rouges et salades rafraîchissent l'été ; les gibiers en sauce au vin, cassoulets, garbures, carbonnade apportent les calories nécessaires pour supporter les rigueurs du froid ; tandis que les vitamines des légumes de printemps et fruits d'été ramènent la vigueur, reconstituent les réserves en vue des prochains efforts.
  • Respecter la saison, dans le cas des poissons et gibiers, permet également de préserver la qualité et la quantité de la ressource. Par exemple, pourquoi en France consomme-t-on les coquillages plutôt pendant les mois en R ? Parce que Louis XIV, grand gourmand et donneur de banquets, se trouva un jour fort dépourvu quand la livraison du soir ne vint finalement pas : la pêche intensive des années précédentes et de mauvaises conditions météorologiques avaient mis à mal toute la culture, ne laissant plus le temps aux mollusques et autres de se renouveler. Il rédigea alors une loi codifiant l'exploitation des coquillages, crustacés et mollusques, définissant des gabarits et autorisant l'exploitation durant les mois à la terminaison en R, le reste de l'année étant la période consacrée à la reproduction et à la croissance de nouvelles générations ; plus tard, la surpêche pratiquée dans les rivières a ainsi presque éradiqué les écrevisses de France, et est désormais interdite.

Consommer des produits frais de saison ne doit pas juste être un acte politiquement vert, suivant stupidement un courant de mode qui surfe entre Accords de Kyoto, altermondialisme et Rapport du GIEC, même si après de folles décennies de surconsommation il va nous falloir revoir nos modes de transport, production et consommation.

Consommer ces produits ne devrait être qu'un acte de bon sens ou de respect :)

  • envers vous : vos papilles et votre organisme vous en seront reconnaissants (Et je profite de l'instant pour réaffirmer que : NON ! Le poisson n'est pas rectangulaire avec une peau déjà pannée, et les vaches ne pondent pas de beurre ! quant aux arbres à pâtes, nan ; mais un arbre à pain, oui :-D ) ;
  • envers votre porte-feuille : pas de sur-coûts de production et prix bas maintenus par l'abondance du produit sur le marché ;
  • envers le producteur, qui a enfin la possibilité de pratiquer correctement son métier ;
  • envers la planète, qui souffre de plus en plus de nos exploitations et avancées technologiques.

Evidemment, consommer des produits frais uniquement de saison peut s'avérer parfois difficile (l'hiver est plutôt pauvre en légumes par exemple), voire préjudiciable à la gourmandise (ainsi, j'utilise tout au long de l'année du thym, des carottes, etc...). Loin de moi l'idée de prêcher pour une stricte et exclusive consommation de produits frais de saison : on connaît aujourd'hui l'importance de la consommation de produits frais, il s'agira donc de faire au mieux, trouver un juste compromis entre vos besoins, vos capacités, et les conséquences économiques, sociologiques et écologiques induites. :)

A suivre, des fiches mensuelles pour connaître mois par mois les produits les plus savoureux : janvier, février, mars, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre, décembre. Pour le moment encore incomplètes, elles s'étofferont progressivement et apprécieront toutes collaborations. ;)

D'ici là, à vos papilles !